L’École d’Été sur la Migration est un programme de formation complet, organisé annuellement par l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) en Tunisie, en partenariat avec l’Institut National du Travail et des Études Sociales (INTES). L’École d’Été se déroule sur cinq jours et permet à des participants issus du monde académique, des institutions étatiques, de la société civile et des partenaires sociaux d’approfondir leurs connaissances sur un thème d’actualité lié à la migration.
L’objectif de l’École d’Été ne se limite pas aux aspects académiques mais, vise également à favoriser la création de réseaux entre les acteurs nationaux et encourage une synergie régionale. Ainsi, l’École d’Été vise à renforcer la collaboration et à stimuler les échanges d’expertise dans le domaine de la migration. La 8ème édition de l’École d’été se tiendra du 26 au 30 août 2024 à Tunis et portera sur le thème « Multiplier les voies de migration régulière : opportunités et enjeux ».
La 8ème édition de l’École d’Été sur la Migration est organisée dans le cadre du Programme Régional Africain pour la Migration (ARMP) financé par le Bureau de la Population, des Réfugiés et des Migrations (PRM) du Département d’État américainet du programme Pour une approche globale de la gouvernance des migrations de travail et de la mobilité de main-d’œuvre en Italie et Afrique du Nord (THAMM Plus), financé par l’Union européenne (DG NEAR).
L’École d’Été s’adresse aux fonctionnaires, universitaires, membres de la société civile, étudiants diplômés qui traitent de la migration dans leurs activités et leurs recherches. Les intervenants de cette édition seront des experts et des praticiens nationaux et internationaux qui interviendront dans des conférences ou des tables rondes. Lors de ces sessions, le débat avec les participants sera animé par des modérateurs. Des sessions de partage d’expérience et des exercices pratiques seront également proposés. Cette édition de l’école sera également enrichie par une foire aux opportunités pour les études à l’international.
La migration a toujours fait partie de l’histoire de l’humanité, façonnant les sociétés à travers les siècles. Les gens migrent pour échapper aux conflits ou aux catastrophes, s’adapter aux effets du changement climatique ou simplement chercher une vie meilleure ailleurs. Aujourd’hui, la mobilité humaine mondiale est sans précédent, avec environ 281 millions de migrants internationaux, soit 3,6 % de la population mondiale, selon les dernières estimations de l’OIM[1]. Les déplacements forcés ont atteint un niveau record, avec environ 108 millions de personnes déplacées à la fin de 2022. Depuis les années 1980, la migration internationale a révélé une augmentation significative des femmes migrant de manière autonome, notamment en tant que travailleuses migrantes. Parallèlement, le changement climatique pourrait entraîner la migration interne de 44 à 216 millions de personnes d’ici 2050, alors que des centaines de millions vivent déjà dans des communautés extrêmement vulnérables aux effets du climat. Lorsqu’elle est bien gérée, la migration peut apporter des avantages considérables, tant pour les individus qui se déplacent que pour les communautés d’accueil et les régions d’origine. Au cœur de cette dynamique se trouve la contribution essentielle des migrants au progrès socio-économique. Leur travail et leur engagement sont cruciaux pour la main-d’œuvre mondiale : chaque augmentation de 1 % de l’immigration pourrait entraîner une croissance du PIB de 2 % dans les régions d’accueil. Des études récentes estiment que la migration internationale génère une production économique annuelle d’environ 9 000 milliards de dollars, ce chiffre pourrait plus que doubler d’ici 2050, pour atteindre environ 20 000 milliards de dollars par an. La migration contribue ainsi à résoudre les défis démographiques mondiaux, que ce soit dans les pays ayant une population vieillissante ou dans ceux connaissant un boom démographique mais qui manquent d’opportunités. Les envois de fonds internationaux vers les pays à revenu faible et intermédiaire s’élèvent désormais à environ 670 milliards de dollars, ce qui dépasse les investissements directs étrangers (IDE) et est bien supérieur à l’aide publique au développement pour ces pays (IOM, Migration Data Portal 2024).
Ainsi, la migration occupe une place centrale dans les cadres internationaux tels que l’Agenda 2030, où elle est reconnue comme un puissant moteur de développement durable, bénéficiant à la fois aux migrants eux-mêmes et aux communautés qui les accueillent.
Les voies de migration régulières offrent l’opportunité de maximiser le potentiel des millions de personnes qui se déplacent déjà à travers le monde. Parallèlement, elles jouent un rôle crucial dans la réponse aux défis mondiaux les plus urgents.
Dans ce contexte, les voies de migration régulières permettent aux personnes de se déplacer, d’entrer et de séjourner dans un État donné selon les modalités autorisées par la législation nationale et les accords internationaux auxquels il est parti. Cela permet de réduire le risque de recours à des intermédiaires informels, contribuant ainsi à l’affaiblissement du modèle économique lié au trafic et à la traite des êtres humains en protégeant les migrants contre les pratiques de recrutement non éthiques, les abus et l’exploitation.
Les voies de migration régulières sont définies par les États dans des cadres juridiques, politiques et réglementaires aux niveaux national, bilatéral, régional ou mondial. Ces cadres définissent les différents objectifs de la coopération, les personnes ayant le droit d’être admises sur le territoire des états et les conditions de leur établissement, la durée de l’établissement et les autres conditions liées à l’utilisation d’une voie de migration régulière donnée.
Les voies de migration régulières sont régies par un large éventail de mécanismes et d’interventions qui sont interdépendantes et s’appliquent tout au long du cycle migratoire. Ceux-ci peuvent inclure les services de documentation et d’identité légale, les systèmes de visa, les services de santé et sociaux, les processus de recrutement, la formation et la reconnaissance des compétences, le soutien à l’intégration et, le cas échéant, au retour et à la réintégration.
Reconnaissant l’importance cruciale des voies régulières pour une migration plus sûre et ordonnée, l’OIM a placé cet enjeu au cœur de sa stratégie 2024-2028.
L’Organisation œuvrera avec ses partenaires pour faire en sorte que les voies régulières existantes et nouvelles soient accessibles et inclusives de façon qu’un plus grand nombre de personnes puissent bénéficier de possibilités de développement et de protection. Davantage de personnes, notamment des jeunes et des personnes handicapées, pourront accéder à des possibilités d’éducation et d’emploi en dehors de leur pays de naissance et retrouver leur famille[2].
Faciliter des voies régulières inclusives et sensibles au genre nécessite des efforts pour créer de nouvelles voies, élargir et renforcer celles qui existent déjà, et améliorer leur impact. Pour atteindre ces objectifs, l’OIM met son expertise au service de trois rôles clés:
La région de la méditerranée et au-delà présente des enjeux particuliers. L’Afrique et l’Europe ont en effet un avenir commun. De l’urgence climatique à l’avenir du travail, les deux continents partagent un intérêt à trouver des solutions aux défis pressants et à œuvrer ensemble pour la prospérité et le développement. La mobilité humaine entre les deux continents est essentielle pour atteindre ces objectifs.
L’OIM a également proposé une nouvelle initiative intitulée « Partenariat Afrique-Europe sur la Mobilité des Personnes : Vers une Nouvelle Ère de Solutions ‘Triple Gagnant’»[3].
Cette initiative vise à faciliter un dialogue constructif entre tous les acteurs concernés pour promouvoir la prospérité et le développement sur les deux continents. Elle s’inspirera des besoins du secteur privé pour l’accès aux marchés du travail, du potentiel des industries créatives et des hubs d’innovation pour attirer les talents, des expériences des administrations municipales pour un accès inclusif aux services, et des partenariats émergents en matière de compétences entre gouvernements et industries.
La 8ème édition de l’École d’Été sur la Migration s’articulera autour de cinq journées axées sur les 5 thématiques suivantes :
Le premier jour sera consacré à l’introduction des principaux cadres de coopération internationale, en commençant par ceux ayant une portée globale et en abordant ensuite les initiatives interrégionales, régionales et sous-régionales, ainsi que bilatérales. Au cœur de cette discussion se trouve le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, un cadre de coopération international juridiquement non contraignant, conçu pour répondre aux défis complexes des migrations à l’échelle mondiale. Adopté dans le cadre de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants[4], ce pacte vise à garantir que les migrations se déroulent de manière sécurisée et ordonnée, tout en respectant les droits de l’homme de tous les migrants, indépendamment de leur statut. Il repose sur des principes directeurs tels que la priorité à la dimension humaine, la coopération internationale, et la souveraineté nationale, reconnaissant que les États doivent travailler ensemble pour gérer les migrations de manière efficace. Le Pacte encourage les États à partager les responsabilités et à mettre en œuvre des solutions novatrices pour maximiser les bénéfices des migrations tout en minimisant les risques et les vulnérabilités auxquels les migrants sont confrontés.
Le Pacte reconnaît également que la migration internationale demande une approche à 360 degrés, coopérative et solidaire, visant à optimiser les avantages globaux de la migration, tout en tenant compte des risques et des défis que rencontrent les migrants et les communautés dans les pays d’origine, de transit ou de destination. Le développement du présent programme repose de manière directe sur les objectifs suivants du Pacte mondiale pour des migrations sures, régulières et ordonnées :
En plus, dans le cadre des processus intrarégionaux, plusieurs initiatives clés méritent d’être soulignées, notamment le nouveau pacte de l’Union européenne sur la migration et l’asile, le Plan d’action de La Valette, ainsi que les processus de Khartoum et de Rabat, les partenariats EU sur la mobilité des talents et le processus de Rome. À l’échelle du continent africain, les aspirations de l’Agenda 2063 et le Cadre de politique migratoire pour l’Afrique mettent en lumière l’importance d’une approche harmonisée de la mobilité humaine.
La première journée de l’école d’été permettra également d’explorer les exemples des mécanismes régionaux mise en place dans le contexte de l’Union Africaine, ainsi que ceux sous-régionaux, tel que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de l’Autorité Intergouvernementale pour le Développement (IGAD) ou la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Est (EAC), qui jouent un rôle fondamental dans la favorisation de la mobilité des personnes.
Au niveau d la Tunisie, un ensemble significatif d’accords ou d’instruments politiques non contraignant régissant la coopération pour la mobilité est disponible. Leur efficacité et les enjeux d’avenir seront explorés.
Les voies de mobilité de la main-d’œuvre, définies comme des mécanismes juridiques, politiques et administratifs permettant des déplacements réguliers, le travail, l’admission et/ou le séjour sur le territoire d’un État, sont reconnues comme des solutions importantes pour faciliter la migration régulière et atteindre les Objectifs de développement durable. Gérer la mobilité internationale de la main-d’œuvre de manière à équilibrer efficacement les nécessites de toutes les parties prenantes (pays d’origine, de transit ou de destination, employeurs privés, migrants eux-mêmes et leurs familles) représente un défi de taille.
En 2019, la main-d’œuvre mondiale comptait environ 169 millions de travailleurs migrants (OIT, 2021), représentaient environ 5 % de la main-d’œuvre dans les pays de destination, avec des proportions atteignant près de 19 % chez les hommes et 18 % chez les femmes avec une forte concentration dans les régions à revenu élevé. Dans de nombreux pays à travers le monde, les travailleurs migrants apportent une contribution significative au marché du travail. Selon l’OIT, en 2021, dans tous les groupes de revenu, le taux de participation au marché du travail des travailleurs migrants était plus élevé que celui des non-migrants. Dans les pays à revenu élevé, le taux de participation des migrants était supérieur de 11,5 points de pourcentage à celui des non-migrants. Ces travailleurs sont essentiels pour soutenir des secteurs économiques clés, notamment l’industrie des services, où la majorité d’entre eux sont employés, y compris un grand nombre de femmes dans les activités de soin à la personne. L’établissement de voies régulières pour la migration est donc fondamental pour garantir un flux ordonné des migrants, en assurant leurs droits et leur intégration sur les marchés du travail, tout en tenant compte des spécificités liées au genre. Il est essentiel de créer des conditions qui respectent et protègent les droits des femmes migrantes, qui représentent une part significative de la main-d’œuvre, et de veiller à leur intégration équitable dans les marchés du travail, en répondant à leurs besoins spécifiques et en favorisant leur autonomisation économique. Ces voies régulières répondent non seulement aux aspirations économiques des migrants, mais aussi aux besoins croissants des pays d’accueil, en particulier face aux pénuries de main-d’œuvre, qui augmentent avec le vieillissement des populations actives. Par ailleurs, les pénuries de main-d’œuvre dans les 30 plus grandes économies mondiales atteignent des niveaux sans précédent, causant des pertes économiques estimées à environ 1 000 milliards de dollars par an (OIM et BCG, 2022).
Les travailleurs migrants jouent un rôle central dans les chaînes de valeur mondiale, soutenant la croissance, l’innovation, et contribuant aux finances publiques des pays d’accueil. De plus, les entreprises créées par des entrepreneurs migrants génèrent souvent des emplois supplémentaires. Alors que les économies et les marchés du travail se complexifient et se mondialisent, des voies régulières de migration, associées à une correspondance efficace entre l’offre et la demande de main-d’œuvre à l’échelle mondiale, seront cruciales pour soutenir la croissance. Le nombre de migrants internationaux, ainsi que leur proportion dans la population mondiale, devraient continuer à croître, reflétant l’intensification des besoins en main-d’œuvre, même dans les pays qui doivent encore établir de nouvelles voies de migration. Dans des régions comme l’Afrique, l’Asie et l’Amérique centrale, il est nécessaire d’intégrer une population jeune en pleine expansion sur le marché du travail. Dans ce contexte, la migration de main-d’œuvre, qui représente 70 % de la migration internationale, devient un levier essentiel pour répondre aux besoins croissants des marchés du travail à l’échelle mondiale, tout en offrant des opportunités économiques aux pays d’origine et de destination.
Une voie régulière de migration de main-d’œuvre est définie comme un mécanisme permettant le mouvement de personnes depuis le pays d’origine vers un pays de destination dans le but d’y obtenir un emploi, ciblant des compétences ou des secteurs spécifiques, et impliquant un rôle significatif des autorités gouvernementales dans sa conception et/ou sa mise en œuvre.
Ces voies régulières de migration de main-d’œuvre se répartissent généralement en trois catégories :
Un mécanisme complémentaire est le Partenariat pour la Mobilité des Compétences, qui offre une plateforme où les parties prenantes des pays d’origine et de destination collaborent pour investir dans la formation des travailleurs pour les deux marchés du travail. Certains travailleurs formés rejoignent le marché local, tandis que d’autres intègrent le marché du travail à l’étranger. De cette manière, les Partenariats soutiennent les économies des pays d’origine et de destination en augmentant leur capital humain et en développant une main-d’œuvre compétitive. Par conception, les Partenariats sont orientés par la demande et peuvent jouer un rôle significatif en facilitant l’acquisition de qualifications et de compétences professionnelles, tout en créant de nouvelles opportunités et en renforçant la coordination institutionnelle ainsi que les capacités pour des systèmes statistiques fiables et la mise à jour plus fréquente des listes de métiers.
La migration entraîne des coûts, souvent supportés par les migrants eux-mêmes. Malgré les efforts des acteurs internationaux pour réguler ces coûts, les migrants en couvrent généralement la majorité. Dans certains cas, ces coûts sont subventionnés par les employeurs ou le pays de destination. Dans d’autres cas, les pays de destination peuvent investir dans le développement de compétences spécifiques nécessaires aux migrants, soit par des investissements minimaux (par exemple, financer un cours de langue de courte durée) ou substantiels (par exemple, financer une qualification professionnelle).
Pour tirer pleinement parti de la migration du travail, il est impératif de promouvoir un recrutement éthique et une gouvernance rigoureuse, tout en prévenant les risques de travail forcé et d’exploitation. Les accords bilatéraux de main-d’œuvre, bien qu’ils ne soient pas nouveaux, doivent être adaptés aux réalités actuelles. Les principes du travail décent, la protection sociale et le dialogue social restent essentiels pour garantir une migration volontaire, réversible et durable, permettant aux migrants d’investir dans leur pays d’origine ou d’accueil.
Une étude menée par l’OIM en Afrique a révélé que peu de pays de la région ont mis en place des accords bilatéraux sur la main-d’œuvre, souvent en raison d’un manque d’expérience dans la rédaction et la mise en œuvre d’accords bilatéraux et d’autres accords et politiques liés à la migration de main-d’œuvre.
L’Afrique et l’Europe ont conclu plusieurs accords bilatéraux et multilatéraux sur la migration et la mobilité au cours des deux dernières décennies, démontrant un engagement continu à trouver des solutions pour une migration bien gérée, sûre et régulière. Le Nouveau Pacte sur la Migration et l’Asile de l’Union européenne, avec des initiatives telles que les Partenariats de Talents et le Pool de Talents de l’UE, souligne l’importance de ces voies pour les deux continents.
Pour finir, une approche fondée sur les droits doit être adoptée pour garantir que les régimes de mobilité de la main-d’œuvre incluent des conditions d’emploi standardisées, respectant les normes internationales du travail, et accordent aux migrants un accès non discriminatoire aux mécanismes de sécurité sociale, avec la portabilité de leurs prestations. La mise en œuvre de cadres d’intégration régionale et de libre circulation peut soutenir la création d’un environnement propice à une approche globale, contribuant ainsi à des sociétés plus équitables et prospères.
La migration pour des raisons d’études est un phénomène multidimensionnel qui englobe des aspects sociaux, économiques, culturels et éducatifs, chacun ayant un impact profond sur les étudiants, leurs pays d’origine et les pays d’accueil. L’entrée, le séjour, la sortie et le retour des étudiants internationaux représentent une voie importante et en pleine expansion, reflétant les tendances plus larges de la mondialisation, de l’échange de connaissances et de la mobilité de la main-d’œuvre. En 2021, le nombre mondial d’étudiants internationaux avait grimpé à 6,4 millions, une augmentation spectaculaire par rapport aux 2 millions du début du millénaire[5]. Cette tendance non seulement reflète l’expansion de l’éducation à l’échelle mondiale, mais souligne également l’importance stratégique que les pays accordent à l’attraction des étudiants internationaux. Au-delà des bénéfices immédiats pour les systèmes éducatifs et les échanges culturels, l’accent mis sur ces étudiants en tant que migrants qualifiés potentiels témoigne d’un intérêt marqué pour exploiter les talents mondiaux. Les décideurs politiques se concentrent de plus en plus sur l’élaboration de politiques facilitant l’intégration des étudiants internationaux dans les marchés du travail des pays d’accueil, reconnaissant les avantages à long terme en matière d’innovation, de développement économique et de renforcement des liens mondiaux. Cette interaction dynamique entre l’éducation internationale et la migration met en évidence le rôle crucial des étudiants internationaux dans la mobilité mondiale.
Les voies éducatives offrent aux personnes la possibilité d’étudier dans un autre pays, en permettant à des personnes éligibles de migrer régulièrement dans un pays dans le but d’étudier, selon des conditions et pour une durée définie par le gouvernement. Ces voies offrent aux étudiants des options d’éducation et de formation plus larges, des opportunités de carrière élargies après l’obtention de leur diplôme et la chance de découvrir d’autres cultures. La migration est udiantine peut être considérée comme une forme de migration des connaissances, car à travers leurs mouvements, les migrants « sont porteurs d’expansion, de diffusion et de circulation des connaissances, qui se manifestent plus tard en tant que professionnels hautement qualifiés contribuant aux marchés du travail » où ils travaillent. Les effets de cela peuvent être positifs pour les pays de destination. Par exemple, au Royaume-Uni, les étudiants internationaux ont eu un impact économique positif lié aux frais de scolarité qu’ils paient et à l’argent qu’ils dépensent, les recettes d’exportation attribuables à l’enseignement supérieur étant de 19,5 milliards de GBP en 2020. Les changements démographiques, avec certaines régions connaissant une augmentation de la population jeune, pourraient accroître la demande pour les voies éducatives à l’avenir.
La mobilité des étudiants maghrébins illustre bien cette dynamique, étant principalement orientée vers l’Europe, avec 88 % d’entre eux se dirigeant vers ce continent, [6]dont 71 % choisissent les 27 pays membres de l’Union Européenne et 17 % optent pour d’autres pays européens hors de l’UE[7].
À l’inverse, la mobilité intrarégionale au sein du Maghreb reste très faible, avec seulement
2 % des étudiants quittant leur pays d’origine pour étudier dans un autre pays de la région[8]. En Tunisie, les étudiantes d’Afriques subsahariennes représentent 74 % de la mobilité en entrée, et des efforts sont en cours pour augmenter leur nombre dans les universités tunisiennes[9].
À la fin de 2023, environ 117,3 millions de personnes étaient déplacées de force dans le monde, soit plus du double du nombre enregistré 10 ans plus tôt (51,2 millions). Ces chiffres incluent les réfugiés, les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays (PDI) et les demandeurs d’asile. Parmi les déplacés de force, les PDI représentent le plus grand groupe, mais la proportion de personnes forcées de traverser des frontières a augmenté, passant de 34,9 % en 2013 à 42,4 % en 2022[10].
Les personnes déplacées de force à travers les frontières cherchent et peuvent obtenir l’entrée et le séjour sur le territoire d’un État pour répondre à des besoins humanitaires ou de protection, sous certaines conditions et délais. Pour éviter que ces individus ne soient confrontés à la violence, à l’exploitation ou aux abus, les pays doivent prioriser leur admission et leur protection, notamment en leur accordant des documents appropriés et des services d’identité légale, en établissant des catégories spéciales de résidence humanitaire, ou en développant des programmes temporaires d’admission et de protection humanitaire. Plus de 140 États ont ratifié soit la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, soit le Protocole de 1967, qui établissent les principes de non-refoulement, par la suite réitéré et élargie par la Convention contre la Torture (Art. 3) et l‘interprétation donnée à l‘article 6 et 7 du Pacte International sur les droits civils et politiques[11].
L’absence de preuve d’identité légale peut constituer un obstacle majeur pour les migrants nécessitant une protection. De même, l’établissement de catégories de résidence spéciales peut être un outil précieux pour les pays souhaitant protéger les personnes déplacées. Par exemple, en 2021, la Colombie a adopté le Statut de protection temporaire pour les migrants vénézuéliens, permettant à ces derniers de rester en Colombie avec un statut régulier et de participer à des activités légales. L’Albanie, de son côté, offre une protection temporaire à ceux qui fuient la guerre ou des crises similaires, garantissant des droits comme l’accès à des services de base, à l’éducation et au travail.
Par ailleurs, la réinstallation constitue un autre outil crucial de protection internationale, répondant aux besoins spécifiques des réfugiés et autres personnes vulnérables. Elle représente une solution durable pour les réfugiés, démontrant ainsi une solidarité internationale et un partage des responsabilités avec les pays accueillant un grand nombre de réfugiés. La réinstallation offre une nouvelle chance de recommencer leur vie à ceux qui, autrement, n’auraient ni foyer ni pays où se sentir chez eux.
L’Organisation internationale pour les migrations collaborent étroitement avec les gouvernements, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), les Organisations non-gouvernementales (ONG) et d’autres partenaires, tels que les compagnies aériennes et les autorités aéroportuaires, pour faciliter la réinstallation. Au cours de la dernière décennie, l’OIM a organisé la réinstallation de plus de 1,19 million de réfugiés et autres personnes vulnérables depuis 166 lieux différents à travers le monde. Chaque année, l’OIM aide en moyenne plus de 30 États à réinstaller, admettre à titre humanitaire ou relocaliser plus de 100 000 réfugiés et autres personnes vulnérables. En 2021, des opérations majeures ont été menées en Égypte, Jordanie, Liban, Turquie et Ouganda, avec le Canada, les États-Unis et l’Allemagne en tête des pays de réinstallation.
Les voies de migration régulières pour la protection sont des options sûres et réglementées qui complètent la réinstallation des réfugiés et peuvent s’adresser aux migrants en situation de vulnérabilité[12]au sens large en leur permettant d’être admis dans un pays et de voir leurs besoins de protection satisfaits tout en pouvant subvenir à leurs propres besoins pour aboutir à une solution durable. Ces voies de protection facilitant l’admission des migrants en situation de vulnérabilité peuvent inclure des voies spécifiques à la situation de ces migrants ou des voies complémentaires qui peuvent être aussi utilisées par des personnes en situation de vulnérabilité, comme illustré par la liste des voies existantes ci-dessous :
Les voies de migration régulières contribuent à la protection des migrants en situation de vulnérabilité car elles créent les conditions pour une migration sûre, digne et respectueuse des droits des migrants. Les voient de migration régulière permettent aux migrants de voyager de manière plus sûre, sans être obligés à emprunter des routes dangereuses et risquer de tomber proie des responsables de la traite des êtres humains et du trafic des migrants. Elles favorisent également un meilleur accès aux services, facilitant ainsi l’intégration et l’apport positif des migrants aux société des destinations, tout comme à celles d’origine.
Le droit à l’unité de la famille est reconnu et protégé par divers instruments relevant du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire [13], parmi lesquels on peut citer le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, qui disposent que « la famille est l’élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l’Etat »[14], ou encore le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention sur le droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Ces instruments relatifs aux droits de l’homme exhortent les Etats à faciliter le regroupement familial des migrants, y compris pour les enfants migrants[15], en tenant compte des intérêts supérieurs de l’enfant. En cas de séparation des membres d’une famille, des moyens efficaces et accessibles permettant de protéger l’intégrité de la cellule familiale contribuent dans une large mesure à des migrations sûres, ordonnées et régulières, un objectif énoncé dans la cible 10.7 des objectifs de développement durable et dans la Déclaration de New York, et qui est au cœur du pacte mondial sur les migrations.
Il est à préciser dans ce cadre que le regroupement familial des migrants est le processus social et juridique de réunion d’un travailleur migrant (le principal) avec les membres de sa famille dans un Etat hôte (où il est employé).
Il existe deux préalables fondamentaux au regroupement de travailleurs migrants avec leur famille :
Les voies de migration familiale peuvent soutenir l’intégration sociale et économique à long terme des migrants principaux et peuvent être bénéfiques pour les pays de destination de diverses manières. Étant donné que les conjoints des migrants principaux tendent à avoir des caractéristiques éducatives similaires, en pratique, la migration familiale peut amplifier les contributions en compétences de la migration de travail (OCDE, 2017). Ces dynamiques peuvent interagir avec les voies de migration de travail. Comme les migrants dont les conjoints travaillent sont plus susceptibles de rester dans les pays d’accueil, permettre l’emploi des membres de la famille accompagnants peut être important pour la rétention des migrants, et limiter la migration liée à la famille peut réduire le succès d’un pays à attirer les migrants qu’il souhaite attirer.
La collecte de données complètes sur la migration familiale à l’échelle mondiale est particulièrement difficile en raison de la capacité variable des pays à recueillir et partager ces informations, notamment dans les régions en développement. En 2022, les pays de l’OCDE ont accueilli 6,1 millions de migrants de type permanent, soit une augmentation de 26 % par rapport à 2021, avec la migration liée à la famille représentant 40 % de ces mouvements (OCDE, 2023).
Conclusion
Répondre aux dynamiques complexes de la migration exige des efforts tout aussi complexes et la collaboration de multiples parties prenantes. Divers éléments, tels qu’une expertise technique approfondie en matière de migration à l’échelle mondiale et plusieurs cadres internationaux comme l’Agenda 2030 pour le développement durable, le Pacte mondial pour les migrations, entre autres, rendent ces efforts tout à fait réalisables aujourd’hui. Il est essentiel de créer davantage d’opportunités pour que les individus puissent migrer régulièrement, de manière à en tirer des avantages tant pour eux-mêmes que pour les communautés d’origine et de destination. Cela peut être accompli en développant des voies de migration régulière. Cette édition de l’École d’Été vise à encourager le dialogue et l’échange sur ces questions et à promouvoir des actions autour des voies de migration, en impliquant les différentes parties prenantes qui ont un rôle clé à jouer dans l’amélioration de la gouvernance des migrations pour tous.
[1]Interactive World Migration Report 2022 (iom.int)
[2] Plan Stratégique de l’OIM 2024-2028, p.19.
[3] Pour plus d’informations, voir le site de l’OIM : Partenariat Afrique-UE sur les migrations, la mobilité et l’emploi (MME) | International Organization for Migration (iom.int).
[4]La Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants est un document adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies le 19 septembre 2016 lors d’une réunion plénière de haut niveau. Cet accord marque un engagement mondial à renforcer la protection des réfugiés et des migrants, à améliorer leur situation et à partager plus équitablement les responsabilités entre les pays en matière d’accueil.
[5] UNESCO, Institute of Statistics, UIS: https://data.uis.unesco.org/
[6] Dynamique régionale – Rapport sur la mobilité étudiante, p. 5.
[7] Dynamique régionale – Rapport sur la mobilité étudiante, p. 10.
[8] Dynamique régionale – Rapport sur la mobilité étudiante, p. 5.
[9] Dynamique régionale – Rapport sur la mobilité étudiante, p. 14.
[10] UNHCR website : https://www.unhcr.org/about-unhcr/who-we-are/figures-glance.
[11] IML Information Note on the Principle of Non-Refoulement, https://www.iom.int/resources/iml-information-note-principle-non-refoulement.
[12] Ce terme a été introduit par l’Objectif 7 du Pacte Mondiale pour les Migration, reconnaissant que les migrants peuvent se retrouver dans une situation de vulnérabilité tout au long de leur parcours migratoire, même après le départ du pays d’origine, et que les états ont une obligation renforcée de les protéger afin d‘assurer le respect des conventions sur les droits de l‘homme.
[13] Notamment l’article 16 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’article 23 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
[14] Déclaration universelle des droits de l’homme, article 16.3.
[15] Article 44 de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille : « 2. Les Etats parties prennent les mesures qu’ils jugent appropriées et qui relèvent de leur compétence pour faciliter la réunion des travailleurs migrants avec leur conjoint ou avec les personnes ayant avec eux des relations qui, en vertu de la loi applicable, produisent des effets équivalant au mariage, ainsi qu’avec leurs enfants à charge mineurs et célibataires. » ; articles 9 et 10 de la Convention relative aux droits de l’enfant : « toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d’entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale est considérée par les Etats parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence » ; à condition que l’intérêt supérieur de l’enfant ait été déterminé. Le regroupement familial est généralement conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. (CEDH, Affaire Sen c. Pays-Bas).
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